Inégalités : l'ancien et le nouveau, le singulier et le plurielNuméro 8 de la Revue Africaine, RouenQue ce soit les révolutions arabes, les mouvements contre les plans d'austérité en Grèce comme en Espagne ou en France dans le mouvement contre la réforme des retraites, aux États-Unis avec le mouvement Occupy Wall Street (OWS), la contestation étudiante au Chili ou au Québec, les mobilisations des jeunes au Sénégal, toutes ces luttes sont motivées, avec l'exigence de justice et de dignité, par le rejet des inégalités vécues comme insupportables et inacceptables.Si le refus des inégalités est une constante historique des luttes populaires, il prend avec la crise et leur exacerbation dans les dernières décennies de domination néolibérale une place centrale. Il va au-delà de la dimension morale, pour devenir un point nodal de la contestation d'un certain système lui-même en contradiction avec ses propres principes libéraux affirmés. C'est à la mesure de l'échec du néolibéralisme à assurer l'égalité des citoyens, des femmes et des hommes, ou tout au moins d'en ouvrir la perspective par la promotion sociale, et au constat qu'au contraire, il creuse les inégalités dans des proportions nouvelles, que se trouvent posés des besoins et des exigences de changements, sociaux, institutionnels, structurels, politiques.De ce point de vue, l'accentuation des inégalités scolaires ne mérite-t-elle pas une attention particulière, dans la mesure où l'école, l'instruction publique a été dans la plupart des pays une institution centrale de promotion et de la réalisation du principe d'égalité ? L'institution est directement frappée par l'ampleur du chômage des jeunes diplômés – on pense à la Tunisie, mais pas seulement – et la discrimination sociale qu'il représente et démultiplie. On sera attentif aussi à la signification des luttes des étudiants, en Grande-Bretagne, au Chili ou au Québec contre le niveau des droits d'inscription à l'université ou leur augmentation et leur conséquence discriminatoire.Ce mouvement d'insurrection contre les inégalités, porte donc dans ce moment particulier de rupture l'appel à des changements profonds, explicitement ou implicitement. Dans le même temps, il ne faut pas oublier que la contestation contre le(s) système(s) et politique(s) actuels pourraient et prennent une autre forme – réactionnaire, qui vise les plus vulnérables (« blaming the victim » en anglais – c'est-à-dire, qui vise les immigrés, les femmes qui n’acceptent pas leur rôle secondaire, les syndiqués, les pauvres, etc.). Le FN en France, le Tea Party aux États-Unis sont des mouvements importants qui essaient de capter le(s) mécontent(s) dans un but autoritaire et inégalitaire. Ces mouvements font partie aussi de la conjoncture qu’une tentative théorique émancipatrice doit prendre en compte.Dans le mouvement contre les inégalités, les luttes féminines occupent une place spécifique en posant la question centrale "Quelle égalité, quelle liberté", et les conditions de la réalisation concrète des droits pour les femmes. Cela dans le champ du travail, de la famille, alors que perdure le système patriarcal, et que croissent les inégalités, ainsi que le développe François Hurstel. Il s'agit de «prendre en compte les réalités contemporaines dans leur complexité, et dans une approche transversale dans le temps et dans l'espace (histoire, international)».Sans doute la situation n'est pas perçue de même manière selon les pays et les continents. Cette perception et le niveau de la contestation – ou de l'acceptation – sont déterminés par les situations sociales, les écarts de revenus, l'appauvrissement de couches de la population face à l'enrichissement insolent d'une minorité sensible y compris dans les pays développés, en Europe ou aux États-Unis. Ils sont déterminés aussi par les mouvements sociaux et syndicaux, les conditions culturelles, l'intégration des individus aux hiérarchies sociales, leur rapport à l'idée même d'égalité.Dans ce numéro, la Revue Africaine propose une démarche pluridisciplinaire pour analyser l'actualité des luttes sociales et citoyennes contre les inégalités notamment en Europe et dans les pays arabes, mais plus généralement dans le monde, à partir d'approches transversales historique, philosophique, anthropologique, socio-économique et politique. Il conviendra de souligner ce qu’elles révèlent de la nouveauté de notre période historique, dans le contexte de la crise et de la mondialisation, de la mise en crise et la contestation des politiques néolibérales. Les contributions pourront porter sur de vastes aires géographiques, ainsi que sur les concepts de reconnaissance, de dignité et de liberté. En effet, la lutte contre l’inégalité relève d’une problématique existentielle d’être Homme.Il sera important dans un premier temps de mettre en exergue la nature même de l’inégalité abordée, son influence sur la vie de l’homme et de la communauté, de la société ou de l’État. En second lieu, on s’intéressera aux diverses luttes institutionnelles ou citoyennes qui ont été menées contre cette inégalité.Domaine de réflexion:L’inégalité économique et sociale,Les milieux scolaires ou/et la reproduction de l’inégalité?L’inégalité et genre, lutte féministe,La religion et l’inégalité,L’inégalité, la liberté et la reconnaissance,La mémoire, l’histoire et l’inégalité,La question juridique.Revue Africaine invite les contributeurs à lui envoyer un texte de 15 pages maximum accompagné d’un résumé en français et en anglais de 15 lignes maximum aux adresses suivantes: kaekae855@hotmail.com , nloison@hotmail.comDate limite de réception des articles: Le 31 décembre 2013Parution du numéro 8, juin 2014
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