« N’assegna quest’ArcaRiparo a la Morte1 »« L’arche était extensible2 »Qu’est-ce qu’une revue d’histoire du cinéma ? Au rythme de trois par an, les récentes livraisons de 1895, seule publication française exclusivement consacrée au passé d’un art encore jeune, sont l’occasion de s’interroger sur cette lecture très particulière, ce parcours par et pour les yeux d’images rares et hantées par leur passé génétique, va‑et‑vient entre les captations d’un film perdu, méconnu ou retrouvé, et le texte scientifique qui l’exhume un peu plus et autrement. L’analyse trouve ici des appuis documentaires, images et mots, qui lui permettent de dépasser les marginalia critiques pour atteindre à une forme approfondie et mixte d’archéologie. Il s’agit bien de « définir dans le tissu documentaire lui-même des unités, des ensembles, des séries, des rapports3 », avec cette possibilité de citer visuellement, par images fixes (photo de tournage, photogramme ou capture d’écran) ou mobiles (reproduction du film ou d’un extrait), l’objet étudié dans le cadre livresque englobant et exposant.Le cinéphile perd le film dès lors qu’il ne le voit plus — et il est peu d’équivalences au livre de chevet, malgré même le DVD et son chapitrage, pour d’évidentes raisons techniques et même logiques, exception faite du découpage et de l’exposition de l’œuvre dans son intégralité, à la manière du cinéaste métrique Peter Kubelka installant au mur les pellicules de son Arnulf Rainer (1958), réalisation ne dépassant pas deux minutes cependant. L’expérience de voir une image de cinéma dans la durée dominée de la lecture, et non pas seulement dans le flux filmique imposé, c’est d’abord celle de faire du plan un tableau, en l’arrachant à la durée définitoire du kinema / movie pour le coller dans l’espace de la page, pour le bonheur prolongé et passablement élégiaque de l’amateur. D’un film pas encore vu, cette image dessine un certain horizon d’attente, elle est l’instant saisi qui promet le plus long moment d’où il provient. Elle se fait trace, enfin, lorsqu’elle est rescapée d’une œuvre ou d’une séquence disparue, parfois détruite. Aux mots, comme images mentales, de suppléer à ce qui manque, de le reconstruire ou du moins de l’imaginer.C’est l’expérience de cette étrangeté, mais aussi celle de l’« historicité du cinéma » que les pages de la revue 1895 nous amène à considérer dans une perspective scientifique : non plus seulement « objet d’amour cinéphilique ou quelque chose de fermé sur soi4 », le ciné
↧