Le numéro 9 de la revue Féeries, bien connuepour les articles et études sur le conte merveilleux qu’elle publie depuis bientôt dix ans, consacre son dossier thématique, coordonné par Ute Heidmann, au dialogisme intertextuel des contes de Grimm. Spécialiste de l’intertextualité des contes, U. Heidmann, réunit des collaborateurs de marque tels Jean Mainil, Cyrille François, Nathalie Prince, Pascale Auraix‑Jonchière, Márcio Venício Barbosa, Loreto Núñez et Jean‑Michel Adam. Avec ce dernier, elle a déjà publié plusieurs ouvrages dont l’un est une véritable référence pour cette problématique, Textualité et intertextualité des contes. Perrault, Apulée, La Fontaine, Lhéritier1. Tous deux énoncent l’idée d’un dialogisme intertextuel, constitutif des contes européens, qui conduit à un dialogisme intergénérique : Les analyses comparatives et discursives menées sur le corpus français, italien et latin montrent que le dialogue entre textes est aussi un dialogue entre genres. Perrault, Lhéritier et d’Aulnoy inventent de nouvelles formes génériques en réponse à celles qui existent déjà, formes génériques qui correspondent mieux à leurs propres époque et culture ainsi qu’à leurs projets discursifs et poétiques respectifs. (p. 11) Ce dialogisme intertextuel, se trouvant en relation de complémentarité avec son homologue intergénérique, est l’armature théorique du dossier qui nous intéresse.Les dialogisme intertextuel chez les frères Grimm Dans son article inaugurant ces études, U. Heidmann avoue son objectif d’« ouvrir la recherche sur les contes aux études interculturelles ». Elle reprend l’idée déjà lancée dans l’ouvrage de 2010 et dans un article de 2011, publié également dans Féeries2: le dialogue entre les textes se manifeste bien dans les contes européens, c’est un dialogue entre les genres qui mène souvent à l’invention de nouvelles formes. En revenant à sa lecture des contes de Grimm, U. Heidmann propose une nouvelle interprétation de la collecte entreprise par les deux frères dans un certain contexte ; la chercheuse de Lausanne y saisit l’élaboration d’une scénographie en trompe‑l’œil où le terme rare de Hausmärchen est choisi de façon stratégique pour servir le projet de « germaniser » les contes européens. La figure stylistique élue par les deux frères, « les contes‑épis de blé », a pour objectif de légitimer un nouveau genre en construction, en l’occurrence les « contes pour les enfants et le foyer ». Par cette image, à grand potentiel suggestif et accessible à
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