Le terme diversité est largement circulant dans le champ socio-politique mondial actuel, ce qui a des répercussions importantes en didactique des langues (désormais DDL) où il se décline sur plusieurs plans inter-reliés: linguistique, culturel, formatif notamment. La diversité linguistique et culturelle est en effet au cœur de discours politiques volontaristes qui, à la fois, influencent les travaux de recherche relevant de ce domaine et se fondent sur ceux-ci. Ces discours thématisent principalement la nécessité d’une part de «préserver» la diversité, identifiée comme en danger dans un monde globalisé uniformisant (cf. par exemple les déclarations de l’UNESCO) et, d’autre part, de la «promouvoir» en ce qu’elle serait, intrinsèquement, porteuse de valeurs comme le partage, la tolérance, l’ouverture à l’autre, l’empathie, etc. De même, l’importance des travaux actuellement effectués sur les cultures d’enseignement et/ou les cultures d’apprentissage s’inscrivent massivement dans la reconnaissance de la diversité «formative», i.e. de la diversité des usages de transmission et d’appropriation des langues.
Toutefois, la notion de diversité reste peu conceptualisée et, de ce fait, donne lieu à des travaux qui, en majorité, consistent essentiellement en un inventaire de ressemblances / différences juxtaposées et donc en une analyse réifiante des formes de diversité étudiées. Cette faible conceptualisation de la notion, qui se double d’un usage massif et non interrogé du terme, élude singulièrement le potentiel de conflit dont celui-ci pourrait pourtant être porteur, si on décidait de l’investir comme tel.
Entre 2011 et 2013, des chercheurs / professionnels de l’enseignement du français issus de cinq pays différents (Afrique du Sud, Cameroun, Chine, France, Mexique) ont travaillé sur ces questions au sein du projet Didactique du français, formation et diversité/altérité en contextes universitaires : pratiques, représentations et évolutions dans différents environnements (désormais DIFFODIA – projet financé par l’AUF). Ils se sont ainsi plus particulièrement intéressés aux modalités de prise en compte (ou non) de la diversité / altérité / pluralité – linguistique, culturelle et formative – telle qu’elle est perçue et interprétée dans différentes formations de français en contextes universitaires et aux conséquences potentielles de cette (non) prise en compte sur l’enseignement / apprentissage des langues, la formation professionnelle à l’enseignement des langues et la recherche relative à ce domaine.
Ce colloque cherchera à approfondir ces réflexions, en les croisant / confrontant avec d’autres, autour de la question des enjeux et des effets didactiques et épistémologiques d’une conception «autre» (i.e. non essentialisante et non lénifiante) de la diversité – linguistique, culturelle, formative– pour la DDL et pour les recherches relatives à ce domaine. Il s’agira ainsi de s’interroger sur les processus et les modalités de construction des catégorisations et des interprétations produites, et notamment sur le traitement (plus ou moins explicite / explicité) du caractère pluriel, voire contradictoire de celles-ci.
Les réflexions se structureront autour des axes suivants:
Axe 1 – Histoires, traditions, modernités en didactique des langues : entre continuités et ruptures?
Les pratiques didactiques et/ou les méthodologies sont souvent interprétées sous l’angle de la rupture entre des courants envisagés comme clairement distincts les uns des autres, se succédant de manière linéaire, l’histoire de méthodologies étant alors présentée comme allant dans le sens d’un «progrès», conçu comme processus continu, cumulatif et universellement partagé.
Quelles sont les origines de cette construction de la DDL et qu’implique-t-elle tant au plan des pratiques d’enseignement / apprentissage et de formation professionnelle qu’au plan de la recherche? Quels enjeux y a-t-il à construire l’histoire / les histoires de la DDL et des méthodologies sous l’angle de la rupture ou de la permanence? Quelle est alors la pertinence des notions de tradition, modernité, progrès en DDL? Quels sont les enjeux et les conséquences des catégorisations ainsi opérées, notamment sur les définitions de la didactique des langues aujourd’hui ou encore sur les modalités de construction des articulations entre théorisations et interventions?
Axe 2 – Circulations, partages, hiérarchisations des usages de transmission et d’appropriation
Les progrès technologiques ont facilité les mobilités (physiques ou virtuelles), entrainant une intensification des circulations des langues-cultures dont les individus sont porteurs, mais aussi des pratiques et des représentations de l’enseignement et de l’apprentissage de celles-ci, qui de fait se rencontrent, s’entremêlent, s’inter-influencent, voire se contredisent. Ces processus engendrent une diversification de la demande, à laquelle doit s’adapter l’offre de formation en langues, et ce d’autant plus que l’enseignement des langues s’est progressivement constitué en marché, dont les enjeux ne sont pas uniquement économiques et commerciaux, mais aussi diplomatiques, géostratégiques et politiques.
Dans ce contexte économique, politique et sociétal renouvelé, quelles places – plus ou moins hiérarchisées vs négociées – pour les différentes langues, leur enseignement, leur apprentissage? Dans quels types de dispositifs didactiques? Que penser de la notion de contextualisation: rencontre et partage entre des offres et des demandes ou, à l’inverse, instrument déguisé du soft power , fondé sur une hiérarchisation implicite et inexprimée? Quelle légitimité des pratiques d’enseignement et d’apprentissage locales et des discours sur ces pratiques? Quelles influences sur l’identité professionnelles des enseignants de langues et plus particulièrement de français? Quels concepts pour rendre compte de ces phénomènes de «rencontre» et d’inter-influence (hybridation? circulation? vernacularisation?...), pour quelles zones de pertinence? Enfin, quels effets de l’internationalisation/ mondialisation sur la recherche: quelles modalités (épistémologiques, méthodologiques, glottopolitiques) de construction de réseaux scientifiques internationaux? Peut-on parler de partage ou de hiérarchisation? Dans quels types de recherches et à quelles conditions? Quels enjeux et conséquences pour la formation à la recherche?
Axe 3 – Enseignement et recherche en didactique des langues: Comparaisons, croisements, confrontations
Les activités didactiques aussi bien que les recherches en DDL s’appuient fréquemment sur des démarches de type comparatif (comparaison de langues, de cultures, etc.). Celles-ci procèdent essentiellement d’une conception homogénéisante, juxtapositive et différentialiste de la comparaison, dans la mesure où il s’agit d’isoler des catégories pensées comme homogènes afin de les différencier les unes des autres (voire de les opposer les unes aux autres). Quelles sont les conséquences d’une remise en question des postulats au fondement de cette conception de la comparaison? On s’intéressera ici à l’analyse critique (méthodologique et épistémologique) de démarches de comparaison mises en œuvre dans l’enseignement / apprentissage des langues et dans la formation professionnelle à l’enseignement : comparaison entre les langues, entre les cultures, dispositifs didactiques dits plurilingues et/ou interculturels, pertinence des notions de culture d’enseignement, culture d’apprentissage, culture éducative, etc.
On s’intéressera également à la théorisation / conceptualisation des démarches de recherche comparatives: comment les concevoir, les mettre en œuvre, en rendre compte, les écrire? Quels peuvent être les apports des autres champs disciplinaires sur la question (histoire, droit, sociologie, sciences de l’éducation, etc.)? Pourquoi et comment intégrer la pluralité des interprétations dans une démarche comparative?
Axe 4 – Approches diversitaires de la didactique des langues et de la didactique du/des français
Les enjeux et problématiques évoquées précédemment supposent de ne plus penser l’enseignement/ apprentissage des langues comme un enseignement / apprentissage de langues prises isolément, mais de le penser comme fondamentalement altéritaire, i.e. comme un enseignement / apprentissage de langues / cultures / traditions en croisement, partage et/ou conflit avec d’autres langues / cultures / traditions. Ce constat, si on le prend au sérieux, invite à revisiter un certain nombre des notions qui sont au fondement de la DDL. Ainsi, dans ce cadre, qu’est-ce qu’apprendre des langues, tant en présence, qu’à distance ou dans des dispositifs hybrides? Comment travailler autrement la compréhension? … et la production? Comment (re)considérer la question de l’interculturel? Quelle(s) place(s) pour le langagier et le littéraire ou encore pour le communicatif et le culturel? Comment penser des formations professionnelles à l’enseignement qui intègrent cette dimension altéritaire? Enfin, quel(s) rôle(s) le(s) français et l’enseignement du/des français peuvent-ils ici jouer?
Proposition de communication et calendrier
Les propositions de communications devront être envoyées à dynadiv@univ-tours.fr au plus tard pour le 18 février 2013 .
Les propositions de communication comporteront, dans un fichier au format Word ou Open Office :
Titre
Nom et prénom de l’auteur / des auteurs
Adresse électronique de l’auteur / des auteurs
Mots-clés (5 maximum)
Axe(s) choisi(s)
Résumé (3000 signes maximum, espaces inclus)
Références bibliographiques essentielles (8 maximum)
Deux modalités différentes de communication sont possibles :
des communications scientifiques «individuelles» (présentées par une ou plusieurs personnes, mais composant une seule intervention)
des communications scientifiques regroupées en fonction d’une thématique commune ou en débat, pour constituer un symposium ou une table ronde (4 interventions maximum, dont possiblement un discutant).
Langues de communication : Les communications se feront principalement en français. Des communications dans d’autres langues sont envisageables, sous réserve que le/la communicant(e) indique explicitement dans sa proposition de communication ce qu’il compte mettre en œuvre pour que son propos soit accessible à un public francophone.
Les décisions des comités scientifiques et d’organisation seront diffusées en juin 2013.
Les textes finaux soumis pour publication (avec sélection du CS) devront être remis dans un deuxième temps, au plus tard courant avril 2014.
Frais d’inscription
Tout public : 80 € / 650 ¥ (RMB) ▪ Etudiants : 30 € / 250 ¥ (RMB)
Comité d’organisation
Responsables
David BEL, Université Normale de Chine du Sud (Canton) / Université de Montréal
Emmanuelle HUVER, Université François-Rabelais de Tours, EA 4246 PREFics-DYNADIV
Membres
Marc DEBONO, Université François-Rabelais de Tours, EA 4246 PREFics-DYNADIV
Valentin FEUSSI, Université François-Rabelais de Tours, EA 4246 PREFics-DYNADIV
Cécile GOÏ, Université François-Rabelais de Tours, EA 4246 PREFics-DYNADIV
LIANG Minyi, Université Normale de Chine du Sud (Canton), EA 4246 PREFics-DYNADIV
MAO Rongkun, Université Normale de Chine du Sud (Canton), EA 4246 PREFics-Rennes
Céline PEIGNÉ, Université de Versailles Saint-Quentin en Yvelines, EA 4246 PREFics-Dynadiv / EA 2450 SUDS
Claudia TORRES, UAEM (Mexique), EA 4246 PREFics- DYNADIV
Secrétariat
Christine CLIMENT, Université François-Rabelais de Tours
LI Jing, Université Normale de Chine du Sud (Canton)
Comité scientifique
Vasumathi BADRINATHAN, Université de Mumbai, Inde
Joël BELLASSEN, INALCO, France
Henri BESSE, Ecole normale supérieure de Lyon, France
Philippe BLANCHET, Université Rennes 2, France
Beatrice BLIN, Universidad Nacional Autónoma de México, Mexique
Emmanuelle CARETTE, Université de Lorraine, France
Véronique CASTELLOTTI, Université F. Rabelais de Tours, France
Daniel COSTE, Ecole Normale Supérieure de Lyon, France
Christine CUET, Université de Nantes, France
Fred DERVIN, Université d’Helsinki, Finlande
Vanessa EVERSON, Université du Cap, Afrique du Sud
FU Rong, Université des Etudes étrangères de Beijing, Chine
Claude GERMAIN, Université du Québec à Montréal, Canada
Mylène HARDY, Université d'économie et de commerce de la Capitale, Beijing, Chine
Guy JUCQUOIS, Université Catholique de Louvain, Belgique
Estella KLETT, Université de Buenos Aires, Argentine
Patricia LAMARRE, Université de Montréal, Canada
LI Keyong, Université des Etudes internationales du Sichuan, Chongqing, Chine
Silvia LUCCHINI, Université Catholique de Louvain, Belgique
Denis C. MEYER, Université de Hong Kong, Chine
Auguste MOUSSIROU MOUYAMA, Université Omar Bongo, Libreville, Gabon
Danièle MOORE, Université Simon Fraser de Vancouver, Canada
Nobutaka MIURA, Université Chûô, Tokyo, Japon
PU Zhihong, Université Sun Yat-Sen, Canton, Chine
Valérie SPAETH, Université Paris 3 Sorbonne, France
Khaoula TALEB IBRAHIMI, Université d’Alger, Algérie
Rada TIRVASSEN, Mauritius Institute of Education, Maurice
VO VAN Chuong, Université de Cantho, Vietnam
Adelina VELASQUEZ HERRERA, Universidad Autónoma de Querétaro, Mexique
Monica VLAD, Universitatea Ovidius, Constanta, Roumanie
WANG Wenxin, Université des Etudes internationales de Shanghai, Chine
XIE Yong, Université des Etudes étrangères du Guangdong, Chine
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