Alors que la catégorie du merveilleux a fait l’objet de multiples études, le processus affectif et cognitif de l’émerveillement, comme transport des sens, du cœur et de l’intelligence, reste à questionner. Cette émotion complexe faite d’effroi et d’abandon, qui dès le Théétète est associée à la démarche philosophique, nourrit dans la modernité aussi bien le récit que la poésie. À côté du désenchantement, de la crise des valeurs et de la nostalgie du Sacré qui irriguent largement la littérature d’après la Révolution, du romantisme à la fin du XIX e siècle, à côté de la mélancolie et du soupçon qui ont caractérisé au XX e siècle le Nouveau Roman ou les écritures blanches, certaines œuvres expriment le sens profane du «miracle», la révélation de l’épiphanie; elles témoignent du crédit accordé à l’expérience immanente de vivre en ce mondeet de l’arrachement à la finitude par l’intuition d’un horizon qui à la fois se dérobe et se dévoile. Loin du sentiment de carence ou d’absence, elles expriment l’assentiment à ce qui apparaît, et la victoire sur la négativité. Ce colloque examinera la manière dont l’émerveillement est thématisé, suggéré, suscité dans des œuvres poétiques et narratives des XIX e et XX e siècles. Ilconjuguera plusieurs perspectives: - Une perspective d’histoire littéraire et d’histoire des mentalités qui confrontela montée en puissance d’un «rationalisme étroit et positif» (Nodier)avec la réhabilitation de l'émotionet le besoin d’admiration inclus dans l'émerveillement. - Une perspective thématique et phénoménologique.Ondistinguera les états de conscience et les expériences affectives liés à l’émerveillement (l’étonnement, la stupeur, l’effroi, le ravissement, l’extase, le sentiment du sublime…), tels qu’ils se manifestent chez les personnages, le narrateur ou l’énonciateur. Quelle relation est tissée entre le monde du texte et le monde de la vie? Comment engager avec le lecteur un contrat fondé sur l’émotion et l’empathie? - Une perspective poétique.Comment l’écriture narrative, «fabrique du continu» (Jean-Paul Goux), vouée à développer une intrigue dans la durée, peut-elle redéfinir sa matière et sa manière à la faveur de l’émotion par définition suspensive qu’est l’émerveillement. Comment organiser la temporalitéà partir et autour d’instants d’exception? Après avoir mis l’accent sur la forme du récit, puis sur la tension narrative (Raphael Baroni, 2007) on pourrait étudier sa force impressive. Du côté de la poésie qui, elle, ne cherche pas la crédulité du lecteur, on pourra par exemple interroger l’engouement pour les formes venues d’ailleurs telles que le haïku Détail du programme dans le document pdf ci-dessous.
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