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Idéologie(s) et roman pour la jeunesse au XXI e siècle

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Appel à communications COLLOQUE international TELEM-Modernités Bordeaux 3 / IUFM d’Aquitaine-Université Montesquieu Bordeaux IV Bordeaux 3-4 octobre 2013 . Idéologie(s) et roman pour la jeunesse au XXI e siècle «Aujourd’hui, remarque Jean-Pierre Bertrand [1] , il est presque “ringard” de recourir à la notion d’idéologie dans la lecture des faits littéraires». De fait, il semblerait que les études littéraires ont renoncé, depuis la fin du XX e siècle, à explorer les textes à partir de «ces carrefours entre l’implicite et l’explicite» que Philippe Hamon [2] appelait «points idéologiques» où «la doxa agit sans se montrer, et ce d’autant plus efficacement qu’elle ne s’avoue jamais [3] .» Pierre Macherey , qui s’était attaché dans les années 1960 aux œuvres littéraires comme lieux où s’énonce de l’idéologie, rappelle également en 2008 que «l’usage de ce concept doit être soumis à une discussion attentive et serrée». Il conclut néanmoins son étude sur la mise en avant d’une forme d’intérêt complexe de la notion: «sans elle, la dimension sociale de la pensée serait sans doute demeurée inaperçue. C’est pourquoi cela a un sens de revenir encore et encore sur cette notion, ne serait-ce que pour en mesurer les équivoques [4] ». Toujours prise entre formatage et création, la littérature pour la jeunesse n’échappe pas au contexte politique et social de sa production, au risque de se faire parfois «littérature concertante [5] », dans une «stratégie d’accompagnement des questions du jour [6] ». C’est dans ce cadre que le colloque «Idéologie(s) et roman pour la jeunesse au XXI e siècle» se propose de questionner la littérature de jeunesse qui s’écrit aujourd’hui: fait-elle entendre sa voix, sur quels sujets et comment? Cette question tripartite n’est pas neuve . Les chercheurs en littérature de jeunesse n’ignorent pas que «le texte possède un impensé [7] » et la spécificité d’une littérature pour jeunes lecteurs qui, dès son origine, revendique une finalité éducative a toujours conduit la critique à interroger de front le pathos et l’ethos des productions destinées aux enfants. Cette double lecture s’impose d’autant plus que certains écrivains et éditeurs prennent aujourd’hui du champ par rapport à la loi de juillet 1949 qui régit les publications pour la jeunesse, loi elle-même fruit d’une idéologie qui unit en son temps catholiques et communistes pour bouter hors de France les super-héros des magazines américains. En effet, selon le credo de bon nombre d’auteurs, il s’agit de montrer aux jeunes le monde et les hommes tels qu’ils sont, sans concessions. Aussi peut-on considérer le roman pour la jeunesse comme porteur d’idéologies irréductibles à l’ignorance supposée du jeune lecteur. Ce colloque souhaite donc apporter sa pierre au vaste chantier ouvert en 2008 par les contributeurs de L’inscription du social dans le roman contemporain pour la jeunesse [8] , et par les travaux menés à Strasbourg en 2009 et rassemblés par Britta Benert et Philippe Clermont sous un titre provocateur: Contre l’innocence. Esthétique de l’engagement en littérature de jeunesse [9] . Il fera suite à la réflexion de grande ampleur prévue à Cerisy en juin 2013: Littérature et culture de jeunesse: La configuration des mœurs [10] , dont l’objectif est d’interroger l’édification, non seulement dans la littérature de jeunesse mais plus largement dans tout ce qui compose aujourd’hui la culture des jeunes. Pour n’être ni redondant avec la recherche déjà établie, ni limité dans ses perspectives mais pour s’inscrire plutôt en complément des travaux récents, notre projet s’attache spécifiquement à un genre et à une périodedont il s’agit d’interroger les tendances les plus nouvelles : le roman du début du XXI e siècle, peu étudié pour l’instant. Si le siècle est encore jeune, le champ est vaste dans la mesure où le roman reste la forme la plus répandue, la plus lue, la plus souple, qui s’accommode de toutes les hybridités et qui repose depuis ses origines sur l’orchestration d’une polyphonie de discours aux origines sociales diverses. Par ailleurs, cherchant de plus en plus à s’affranchir des contraintes légales, certains auteurs et éditeurs éprouvent la liberté d’écrire et de publier pour un lectorat exigeant et mouvant dont l’âge n’est pas toujours une indication sûre et moins encore une limite. C’est dans ce champ du roman au présent et aux frontières incertaines [11] que nous souhaiterions saisir l’idéologie à l’œuvre. Conscients que le mot et plus encore l’adjectif «idéologique» qui en découle ont perdu de leur sens à trop se frotter aux discours médiatiques, nous aimerions rassembler les communications du colloque autour d’une définition de l’idéologie comme système d’idées, comme vision du monde. Le rappel de Paul Aron nous offre un cadre pour notre étude: «Le terme idéologie a reçu de multiples acceptions (c’est précisément en cela qu’il fait débat), mais toutes portent assurément autour du rôle des représentations et des idées d’un groupe social [12] .» On le voit, on ne saurait parler des rapports de la littérature avec l’idéologie sans parler des rapports et de l’idéologie et de la littérature avec la société [13] . Les communications pourront s’orienter versun état des lieux du «roman-miroir», type romanesque par excellence de la littérature de jeunesse. En contrepoint de cette veine réaliste, un regard sur les utopies et contre-utopies qui abondent aujourd’hui sur les rayons de la fantasy questionnera l’enchantement du monde qu’elles proposent ou, au contraire , le désenchantement qui fait le succès des best-sellers planétaires dont les Hunger Games [14] sont le plus récent exemple. On se demandera quelles grandes questions taraudent aujourd’hui la littérature pour la jeunesse et quelle(s) société(s) elle idéalise, critique et/ou cherche à transformer, voire subvertir. Si les nombreuses «écofictions» témoignent d’une prise de conscience verte sur une planète en danger, qu’en est-il de la mondialisation, de la finance, du travail et de son corollaire le chômage? Quels discours sont tenus sur la ville quand la majorité des récits la prennent pour cadre et, en contrepartie, que devient le monde rural si peu présent dans les fictions? Quels milieux sociaux sont représentés, quels modes de vie, quels «codes» sont valorisés ou méprisés? Dans quelle mesure et de quelle façon les questions sociétales portées par les mouvements militants qui ont donné naissance aux gender studies se répercutent-elles sur la production pour la jeunesse? La mise à jour de ces thématiques frappées au coin des idéologies dans les romans pour la jeunesse – et les propositions ci-dessus ne sont pas exhaustives – ouvre la voie à l’étude des discours qui les portent. Ceci suppose la prise en compte du choix d’un genre protéiforme dont le caractère engagé relève d’un «appel aux capacités de jugement des lecteurs [15] ». De surcroît, à la suite des travaux de Philippe Hamon [16] qui cherchait dans les textes romanesques du XIX e siècle l’absence révélatrice de l’idéologie à l’œuvre car «l’idéologie et son travail de filtrage se laissent appréhender dans l’ écart qui existe entre un modèle construit, faisant office de norme, et un donné [17] », peut-on chercher dans le roman pour la jeunesse une «poétique des valeurs [18] », ces instruments dont dispose un récit pour faire passer des valeurs, ces lieux du texte où s’affichent ou se cachent les idéologies? Par ailleurs, on peut se demander si l’idéologie n’est pas portée par une nouvelle forme de fiction. Rencontre-t-on, dans le champ du roman pour la jeunesse et adaptées à ce lectorat, ces «fictions critiques» que Dominique Viart définit comme des textes où «le discours met en crise la pensée», où la fiction «ne s’éprouve pas selon sa définition canonique de“production de l’imaginaire” mais comme interrogation des représentations qui traversent le sujet ou le corps social» et où enfin, «faute de pouvoir s’établir sur le modèle traditionnel de son épanouissement narratif, la fiction critique s’interroge sur sa manière d’être et sur la forme qu’elle adopte [19] »? Enfin, alors que l’actualité politique concernant l’école en France ramène la question récurrente de l’enseignement de la morale sur le devant de la scène publique, la réflexion menée par le colloque accordera une large place à la didactique de la littérature. Après avoir été cantonnée en 2008 dans les marges des programmes du collège et réservée à la seule lecture cursive, la littérature pour la jeunesse vient d’être réhabilitée grâce à la publication d’une nouvelle liste ministérielle de référence [20] où figurent des titres de romans récents. Si depuis une dizaine d’années la littérature de jeunesse est devenue très officiellement objet d’enseignement à l’école et partant, support, entre autres, pour l’éducation civique et les débats philosophiques, on pourra se demander quelle place occupe, dans les corpus abordés, la création romanesque contemporaine? Quels romans sont lus ? Pourquoi et comment ? Dans quelle mesure leur portée idéologique est-elle prise en compteet de quelle façon ? Comment l’enseignant aborde-t-il des objets qui peuvent susciter des attitudes opposées de censure ou de mise en exergue, au risque de conduire à négliger ou à instrumentaliser la dimension littéraire des œuvres? Le choix des œuvres et leur didactisation posent de multiples questions liées à la visée toujours éducative, moralisatrice et édifiante – ou édificatrice, dans un sens qui pourrait être positif – de la littérature pour la jeunesse. Faut-il voir dans le roman pour la jeunesse le lieu de l’engagement et du militantisme de certains auteurs et éditeurs — relayés, à leur insu, par les enseignants —, au risque d’une littérature porteuse d’une idéologie unifiée, consensuelle et « droits-de-l’hommiste [21] » ? Ou au contraire, faut-il lire à l’école le roman pour la jeunesse comme une chambre d’échos où résonnent des voix singulières, susceptibles d’aider à mieux penser et comprendre le monde? Les propositions de communication accompagnées d’une courte notice biobibliographique sont à adresser avant le 15 février 2013 à l’adresse suivante: ideologie-roman@iufm.u-bordeaux4.fr Comité scientifique - Gilles Béhotéguy, IUFM d’Aquitaine-Bordeaux IV, TELEM - Christiane Connan-Pintado, IUFM d’Aquitaine-Bordeaux IV, TELEM - Brigitte Louichon, IUFM d’Aquitaine-Bordeaux IV, TELEM - Jean-François Massol, Université Stendhal Grenoble 3 CEDILIT - Jean Perrot, Université Paris XIII, Institut Charles Perrault - Gersende Plissonneau, IUFM d’Aquitaine-Bordeaux IV, TELEM - Anne Vibert, IG, CEDILIT Grenoble 3 Comité d’organisation: Responsables - Gilles Béhotéguy, Christiane Connan-Pintado, Gersende Plissonneau, IUFM d’Aquitaine-Bordeaux IV, TELEM - Camille Horsey, service RI-Recherche, IUFM d’Aquitaine - Bordeaux IV Secrétariat et communication - Claudia Boursier, service RI-Recherche, IUFM d’Aquitaine - Bordeaux IV - Eric Tattevin, service Communication, IUFM d’Aquitaine - Bordeaux IV [1] Jean-Pierre Bertrand, «Haro sur l’idéologie», in Contextes n°2, février 2007. En ligne sur le site http://contextes.revues.org . [2] Philippe Hamon, Texte et idéologie, Paris, P.U.F., «Quadrige», 1984. [3] Jean-Pierre Bertrand, op. cit. [4] Pierre Macherey, «Idéologie: le mot, l’idée, la chose», Methodos [En ligne], 8, 2008, consulté le 26 octobre 2012. URL: http://methods.revues.org/1843 ; DOI: 10.4000/methodos.1843 [5] Dominique Viart et Bruno Vercier, La littérature au présent , Paris, Bordas, 2008, p. 9. [6] Francis Marcoin, «Critiquer la littérature de jeunesse: pistes pour un bilan et des perspectives», Le français aujourd’hui , 005/2, n° 159, p. 24. [7] Benoît Denis, «Ironie et idéologie», in Contextes n°2, op. cit. [8] Kodjo Attikpoé (dir.), L’Inscription du social dans le roman pour la jeunesse , Paris, L’Harmattan, 2008. [9] Britta Benert, Philippe Clermont (dir.), Contre l’innocence. Esthétique de l’engagement en littérature de jeunesse, Frankfurt am Main, Peter Lang, 2011. [10] Littérature et culture de jeunesse : La configuration des mœurs. Sous la direction de Ch. Chelebourg et F. Marcoin. Cerisy, 19-26 juin 2013. [11] Voir les textes du premier colloque consacré à la littérature de jeunesse à Cerisy et rassemblés par Isabelle Nières-Chevrel: Littérature de jeunesse. Incertaines frontières , Paris, co.éd. Cerisy et Gallimard Jeunesse, 2005. [12] Paul Aron, «L’Idéologie», in Contextes n°2, op.cit. Nous soulignons. [13] Voir l’article de Naïm Kattan, «Littérature et idéologie», Etudes littéraires, vol. 6, n°3, 1973, p. 339-344. En ligne sur le site http://id.erudit.org/iderudit/500293ar . [14] Suzanne Collins, The Hunger Games , New York, Scholastic Press, 3 vol., 2008-2010. [15] Benoît Denis, Littérature et engagement , Paris, Seuil («Points»), 2000, p. 84. [16] Philippe Hamon, Texte et idéologie , op. cit. [17] Ibid. p. 14. [18] Vincent Jouve, Poétique des valeurs , Paris, PUF, 2001. [19] Dominique Viart, «“Fictions critiques”: la littérature contemporaine et la question du politique», in Jean Kaempfer, Sonia Florey et Jérôme Meizoz (dir), Formes de l’engagement littéraire (XVe-XXIe siècles) , Lausanne, Editions Antipode, 2006, p.185-204. [20] Les 384 titres proposés par la liste de «Lectures pour les collégiens» s’adressent aux lecteurs du CM2-Sixième à ceux de la Troisième-Seconde. Elle est en ligne depuis septembre 2012 sur le site http://eduscol.fr/pid26480/liste-lecture-pour-les-collegiens.html [21] L’expression est de Pierre Bruno. Existe-t-il une culture adolescente?, In Press Editions, 2000.

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