De la mémoire personnelle à la mémoire partagée:partage, transmission, constitutionAppel à contributions (Cahiers du CIERL)De quelles manières s'articulent mémoire personnelle et mémoire collective? Quelles sont les modalités d'échange, de circulation, de composition qui permettent au souvenir singulier de rejoindre ou d'augmenter la mémoire partagée? Comment l'identité personnelle s'arrange-t-elle de telles procédures, en tire profit, les manie, les manœuvre?Il semble particulièrement important de poser ces questions pour les siècles d'Ancien Régime. Non que cette période découvre ou invente le rapport entre ces deux mémoires mais parce qu'elle modifie sensiblement les termes de leur relation. De la fin du XVI e siècle à la Révolution, la conception et la représentation de la mémoire changent notamment quant à son rôle dans l'appropriation et la constitution du savoir. La déconsidération d'une érudition qui encombre inutilement l'esprit au profit d'une connaissance bâtie sur des expériences ou des pratiques personnelles trouvent très tôt des défenseurs parmi les hommes de lettres, les philosophes, les hommes de science. De telles allégations n'impliquent évidemment pas le rejet d'une mémoire commune héritée ou enrichie par les auteurs. Elles signalent plutôt la redéfinition d'un équilibre ou d'un agencement signifiant.En effet, à la fin du XVIII e siècle, une attention particulière semble portée aux souvenirs singuliers, à leurs fonctionnements physiologiques, intellectuels et affectifs. Ce sont la place et la valeur du souvenir personnel qui se transforment, ce dont témoignent, par exemple, la multiplication des pseudo-mémoires ou la publication des Confessions de Rousseau. Chez ce dernier, le retour aux «charmants souvenirs» constitue, indissociablement, une nécessité personnelle et publique, débarrassée de la justification de témoignage historique des Mémorialistes. Enfin, l'Encyclopédie, qui aborde la mémoire comme la collection de nos connaissances ( Discours préliminaire de l'Encyclopédie) apparaît comme une somme de savoirs consultable, recueil écrit qui n'est plus à mémoriser. Pourtant, à la frontière du XVI e et du XVII e siècle, la pertinence d'une distinction entre ce qui ressortit de la mémoire personnelle et ce qui appartient à un contenu culturel commun n'est pas évidente. Dans le courant du XVII e siècle, Descartes dit construire une science certaine qui ne soit pas assujettie à la mémoire des Anciens et convoque, pour cela, ses propres souvenirs. Il n'en assimile pas moins une tradition philosophique qui lui permette d'intégrer la mémoire instituée de l'École et celle, en formation, du savoir mondain.Par conséquent, l'objectif de ce recueil est double: tenter de comprendre comment s'est opérée cette transformation; et, pour y parvenir, discerner quelques modalités précises d'articulation.Les articles pourront s'intéresser par exemple (mais non exclusivement):- aux spécificités et aux évolutions qui combine différents types de mémoire – savante, historique, politique, littéraire – à diverses communautés ou institutions – intellectuelles, religieuses, étatiques.- à l'examen d'interactions de certains discours, de leurs interdépendances, de leur relation à des aires d'influence ou de légitimation, constituées ou en devenir.- à la démarche des mémorialistes qui, exilés du cercle royal, pensent leur texte comme autre lieu de mémoire historique.ModalitésLes propositions (500 mots) seront à envoyer d'ici le 1 er juillet à Pierre-Olivier Brodeur (pierre-olivier.brodeur@umontreal.ca) et Judith Sribnai (jsribnai@uottawa.ca). Les articles retenus seront à remettre le 1 er décembre, pour une publication prévue en 2014 aux Cahiers du Cercle interuniversitaire d’étude sur la République des Lettres (CIERL) ( http://www.cierl.ulaval.ca/publications/cahiers/ ). Notre approche est interdisciplinaire, nous encourageons donc les propositions des chercheurs en Art, Lettres et Sciences humaines.
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