L'immanence en question Texte d'orientation Si la Sémiotique demeure une discipline en construction, c’est peut-être par le fait que, depuis sa constitution, elle possède un trait qui la distingue du concert des autres sciences humaines et sociales : celui d’être un projet inachevé tout en restant une étude à vocation scientifique. Ce penchant vers l’imperfection, voire vers l’incomplétude, l’oblige à se retourner sur elle-même et à réviser sans cesse son métalangage. Loin d’être fermé, ce métalangage évolue par le facteur que Hjelmslev appelait d’adéquation : un principe dynamique qui établit une mise en cause du répertoire terminologique selon les besoins reconnus aux objets d’étude. Explorant ainsi les vastes domaines conceptuels que la sémiotique intègre au fur et à mesure de son expansion, les termes inventés se connectent à ceux déjà existant de telle sorte qu’aucun de ces points nodaux du métalangage ne peut être défini sans la participation des autres termes appartenant au même réseau notionnel, ni être supprimé sans provoquer des incohérences ou, pire encore, sans entrer en concurrence ou en contradiction avec les métatermes déjà introduits. Cependant, il est également vrai que le métalangage – tout comme les langues naturelles qui le prennent en charge – fluctue en focalisant l’un ou l’autre répertoire lexical sur la scène du discours scientifique. Plus récemment, c'est le concept d’immanence qui semble concentrer l’attention des chercheurs. La centralité de ce concept se doit non seulement à sa fonction de soutien épistémico-méthodologique, mais aussi au fait que ce même terme fait office de passage, tel un véritable connecteur avec d’autres disciplines. Ainsi, l’immanence, non seulement concentre sur elle-même ces fonctions de connexion, mais relie historiquement notre discipline à deux domaines vitaux pour son évolution: d’une part, la Linguistique et, de l’autre, la Philosophie. Les courants structurels et post-structurels favorisent un espace transversal dans lequel la Sémiotique assume son importance en tant que science du langage et, c’est à partir d’un tel soutien que ses relations interdisciplinaires s’étendent de manière considérable. Pourtant, pourrions-nous soutenir que, dans ces différents domaines disciplinaires, nous pensons tous à une définition univoque lorsque nous mentionnons l’immanence ? Pour répondre convenablement à cette question, nous devons prendre en compte la complexité de sa définition car il ne faut pas oublier que ce concept intègre un ensemble de caractéristiques distinctes les reliant dans un champ sémantique commun. Ainsi, nous retrouvons les expressions : a) principe d’immanence ; b) niveau d’immanence ; c) plan d’immanence ; d) fond d’immanence ; et, bien évidemment, nous pourrions peut-être trouver d’autres acceptions. Pourtant, entre la première et les trois notions suivantes, il y a une différence considérable étant donné que le point a) fait référence à la méthode et aux procédures de travail qui en dérivent, tandis que les points b), c) et d) appartiennent à la constitution du texte ou à la génération du discours. Cependant, ces usages confluent tous vers un même fondement commun quant à l’attitude vis-à-vis de la recherche en sciences humaines. Notre invitation à réfléchir sur ce thème, dont en définitive la portée dépasse le structuralisme ainsi que le post-structuralisme, répond en partie à l’exigence, manifestée par les chercheurs eux-mêmes, d’une mise à jour du concept d’immanence. Nous pourrions synthétiser ce débat en le résumant ici par trois attitudes critiques : 1) le sens n’est pas immanent au texte car il se construit grâce au travail de l’interprétation ; 2) un retour à la phénoménologie de l’expérience et de la perception renvoie à la transcendance du vécu ; et, finalement, 3) le fondement de la praxis énonciative n’est plus considéré comme un passage immanent des structures narratives au discours, mais comme l’acte de production dans la dynamique de l’interaction. L’immanence est donc en jeu. Le débat ainsi lancé, il ne nous reste plus qu’à ajouter, en qualité de coordinateurs de ce projet – non pas neutres, mais bien évidemment engagés – quelques derniers points qui, en sus de ceux que nous avons déjà signalés, peuvent orienter davantage une telle réflexion. Tout d’abord, si nous pensons à l’immanence comme à une valeur, nous devrons pouvoir déterminer ce à quoi elle s’oppose : à la transcendance ou à la manifestation par exemple, et cela afin de pouvoir établir ensuite avec quelle autre valeur elle peut être échangée. Il apparaît que, au moins dans ce dernier cas, la problématique de l’immanence est strictement liée à celle des modes d’existence sémiotique : le réalisé étant de l’ordre du manifeste, tandis que le virtuel relèverait du projet immanent. Par cette trajectoire existentielle, nous pouvons alors nous demander si et comment les passions – et bien évidemment la subjectivité qui est impliquée – seraient également ancrées dans l’immanence. D’ailleurs, il est possible qu’au cours de cette recherche d'oppositions pertinentes d’autres valeurs surgissent, par exemple celles à la référence ou à l’événement, valeurs émergentes dans la sémiotique de la culture et de la temporalité qui semblent encore démentir une position immanente. Une telle mise en question pourra alors se terminer par la dévalorisation du concept d'immanence, ou entraîner plutôt une augmentation de sa valeur par une compréhension tirée au clair. Et pour finir, une dernière question s’impose : comment pourrait-on assurer, sans l’immanence, la tâche du sémioticien, à la fois phénoménologue, constructiviste, n’hésitant pas à intégrer sa propre sensibilité pour la trouver objectivée par son propre discours d’analyse ? Information complémentaire Les articles devront être envoyés au plus tard la première semaine du mois d'octobre 2013 aux adresses électroniques suivantes : alessandro.zinna@univ-tlse2.fr, luisanrm@prodigy.net.mx et semioticabuap@hotmail.com (Programme de Sémiotique et Études de la Signification, BUAP). Les articles devront être inédits ; Tópicos del Seminario diffuse des travaux originaux, qui se distinguent par la qualité de leur recherche et de leur écriture, et leur actualité dans les disciplines en rapport avec la signification. Nous acceptons des articles rédigés en espagnol, français, italien, portugais et anglais, cependant, après avoir passé le processus du double arbitrage et avoir été acceptés pour leur publication, les textes seront de préférence traduits en langue espagnole par des spécialistes. Les articles sont soumis à un double arbitrage. Les collaborations devront avoir une longueur maximum de 35.000 caractères. Les textes devront être accompagnés d’un résumé d’environ 130 mots (soit approximativement 700 caractères), de trois mots clés et des informations suivantes : nom de l’auteur, institution, dépendance, adresse institutionnelle, téléphone, fax et courrier électronique. Les tableaux, graphiques et autres documents seront présentés à part, sur feuilles numérotées de manière indépendante. Si le texte inclut des images, celles-ci devront être présentées à part et avoir les autorisations de reproduction correspondantes ; une copie de ces autorisations sera annexée à l’article. Les images seront remises en format numérique avec une résolution de 300 points par pouce (dpi), en format jpg et en archive à part. L’impression des images en couleur se fera à critère du Conseil Éditorial de la revue. Les matériels seront remis en version électronique et imprimés. Toute la correspondance sera envoyée à l’adresse suivante : Tópicos del Seminario Apartado postal 1110 Centro Histórico 72000 Puebla, Puebla Tel. et fax: (+ 52 222) 229 55 02 Toute l’information relative aux 28 numéros publiés jusqu’à présent de la revue Tópicos del Seminario peut être consultée sur le lien “Publicaciones” de la page internet suivante : www.semiotica.buap.mx.
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