Colloque«Traversées : la critique moderne au Québec (1920-1960)» 6-7 mars 2014, Montréal - appel pour le 15 mai 2013 Cléricale et nationaliste, la critique littéraire canadienne-française naît au tournant du vingtième siècle avec les travaux de Camille Roy, qui utilise la tribune scolaire pour soutenir et orienter la production littéraire de ses compatriotes. Alors que la parole de Roy s’appuyait sur le «nous» de la nation qu’il s’agissait justement de fortifier, la critique ultérieure sera parfois le lieu d’éclosion d’un «je» qui s’affermit dans son contact avec les œuvres littéraires, les arts visuels ou le théâtre. Entre 1920 et 1960, c’est en marge des lieux hégémoniques comme l’Église et l’école qu’apparaît la subjectivité critique, dans l’espace éditorial souple de certains journaux et périodiques où s’élabore une appropriation des œuvres qui en déplace progressivement la portée symbolique et sociale, et incite le lecteur à renégocier son rapport avec elles. Ce sont les formes et fonctions de cette critique subjective ainsi que son impact souterrain sur la doxa que ce colloque propose d’explorer, de son émergence au milieu des années 1920 jusqu’à la veille de sa légitimation par l’institution littéraire de la Révolution tranquille. Cette période foisonne de discours interprétatifs où s’affiche sous diverses formes la subjectivité des lecteurs spécialisés. Pensons, dans le domaine littéraire, à celle des écrivains de l’«âge de la critique» (L. Dantin, M. Hébert, A. Desrochers, A. Pelletier, J.-C. Harvey, M. Le Normand ou C.-H. Grignon), dont l’individualité s’exprime par une pratique polémique ou fictionnelle (pastiches, entrevues fictives) de la critique; à celle des intellectuels de La Relève ou de Gants du ciel (R. Charbonneau, R. Élie, Saint-Denys Garneau, M. Raymond, G. Sylvestre ou J. LeMoyne), dont la lecture et l’appropriation des œuvres puise aux sources du personnalisme chrétien; à celle des «grands amateurs» (R. Pageau, R. Duhamel, P. de Grandpré, M. Beaulieu, M. van Schendel ou G. Marcotte) dont la critique en est une d’accompagnement sensible des textes. À l’occasion, la subjectivité critique pourra également provenir de l’horizon universitaire, comme c’est le cas chez Gérard Bessette, Fernande Saint-Martin ou Jeanne Lapointe, qui polémique à ce sujet avec son recteur, F.-A. Savard. Par ailleurs, certaines démarches artistiques comme l’automatisme appellent sans doute une posture plus subjective par leur rejet même du primat de la rationalité. L’histoire littéraire a conféré une importance notable à certains de ces critiques – pensons au LeMoyne de Convergences (1961) ou au Marcotte d’ Une littérature qui se fait (1962) –, notamment grâce à la réédition en recueils d’articles parus au cours des années 1940 et 1950. L’individualité qui s’y dévoile a parfois même été lue comme symbole d’une mutation identitaire «du critique littéraire canadien-français en essayiste québécois» (J. Larose). Or, tous les types de critique subjective de l’époque n’ont pas bénéficié d’une telle reconnaissance. Quels éléments l’institution littéraire a-t-elle sélectionnés a posteriori , et quels sont les relais qui ont assuré la transmission de certains d’entre eux au détriment des autres ? Depuis les années 1920, comment l’appropriation de la littérature et des arts s’est-elle énoncée dans la critique non académique, et que peut-on en déduire de l’évolution du rapport symbolique entre le sujet, l’œuvre et la société québécoises ? Au-delà des influences françaises, peut-on établir des comparaisons avec des critiques canadiens-anglais et américains tels que Northrop Frye, Wallace Fowlie ou Edmund Wilson, par exemple ? Ce colloque propose en somme d’éclairer l’émergence et l’évolution de la subjectivité critique au Québec, en privilégiant les approches synthétiques et problématisées par rapport à l’étude de pratiques individuelles. Les propositions de communications (200 mots) accompagnées d'une notice biobibliographique doivent être envoyées au plus tard le 15 mai 2013 aux deux adresses suivantes: Karine.cellard@cegepoutaouais.qc.ca et vincelambe@gmail.com
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