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Déjouer l'injouable

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DÉJOUER L’INJOUABLE Colloque international – Université Stendhal-Grenoble III 28-29 novembre 2013 «Le texte de théâtre n’aura de valeur pour nous qu’inattendu, et – proprement – injouable. L’œuvre dramatique est une énigme que le théâtre doit résoudre. Il y met parfois beaucoup de temps. Nul ne savait comment jouer Claudel au commencement, ni Tchékhov, mais c’est d’avoir à jouer l’impossible qui transforme la scène et le jeu de l’acteur; ainsi le poète dramatique est-il à l’origine des changements formels du théâtre; sa solitude, son inexpérience, son irresponsabilité même, nous sont précieuses.» Antoine VITEZ, «L’Art du théâtre» (1985), in Le Théâtre des Idées L’objet de ce colloque, organisé par le pôle CINESTHEA de l’équipe de recherche TRAVERSES 19-21 en partenariat avec l’Hexagone, scène nationale de Meylan, est de s’interroger sur une notion souvent employée de manière empirique et subjective pour désigner toutes sortes d’œuvres a priori incompatibles avec la scène, ou du moins avec «la pratique scénique dominante» d’une époque (Bernard Dort, «Le texte et la scène, pour une nouvelle alliance»). Il ne s’agira pas d’inventorier les pièces impossibles en faisant l’histoire des théâtres «dans un fauteuil», mais d’examiner, dans une perspective dynamique, le passage à la scène – différé ou complexe – de certains textes ou projets de création qui, pour des raisons internes (composition spatio-temporelle, construction des personnages, hybridation formelle, etc.) ou externes (effacement des codes contextuels permettant de les comprendre, évolution technique, modifications de l’horizon d’attente des producteurs, créateurs et spectateurs), obligent les praticiens à inventer des solutions pratiques inédites, et les spectateurs à redéfinir leur conception de la théâtralité. Axe «Réception»: l’historicité de l’injouable Comme le démontrent des fortunes scéniques tardives, ou décalées, comme celle de Lorenzaccio , ou du premier théâtre de Maeterlinck, les critères du «non théâtral» varient grandement selon le temps. C’est donc l’historicité de la notion d’«injouable» que nous souhaitons d’abord interroger. Le mot, qui apparaît dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle – il est notamment recensé dans le Trésor de la langue française sous la plume de Voltaire – pourrait, en effet, sembler frappé d’obsolescence au XXe siècle, dès lors que l’esthétique scénique n’est plus placée sous la tutelle exclusive de la mimesis , et qu’il devient possible de «faire théâtre de tout», comme l’affirmait Antoine Vitez. On se demandera donc dans quelle mesure le terme peut être envisagé comme un révélateur des normes et canons d’un certain âge du théâtre, celui qui voit le modèle rhétorique dominant décliner au profit d’un paradigme pictural et illusionniste (autour de 1750), et qui va céder la place, avec le tournant de la modernité, à l’ère du metteur en scène. Pour mettre à l’épreuve cette périodisation, et afin de mieux cerner la spécificité des critères de «non-théâtralité» présupposés par l’emploi en Français du qualificatif «injouable» selon les époques, il serait souhaitable d’étudier un certain nombre de cas présentant des décalages significatifs entre histoire littéraire et histoire des théâtres (qu’il s’agisse de fortunes scéniques tardives, ou inversement de sorties de répertoires ne relevant pas exclusivement d’un effet de mode), mais aussi d’envisager des discours théoriques et critiques issus de périodes et d’ères géographiques différentes. Axe «Création»: La scène contemporaine à l’épreuve de l’impossible Si tout passage à la scène constitue un défi, certains matériaux posent toutefois plus de problèmes que d’autres dans les conditions actuelles de représentation. Qu’ils ressortissent à un contexte historique dont la disparition présuppose un travail de réinvention, qu’ils procèdent d’un croisement avec d’autres disciplines – la danse, le cinéma, les nouvelles technologie, etc. – qui perturbe les conditions de présence, ou qu’ils s’adossent, comme cela est devenu courant dans les dramaturgies contemporaines, à des propositions référentielles si illogiques ou d’une abstraction telle, qu’on ne sait ou ne peut les figurer, force est de constater qu’ils ne rebutent plus la scène contemporaine, mais tendent au contraire à la stimuler. Tout se passe en effet comme si l’injouable n’était plus paradoxalement concevable que mis en jeu(x). C’est à l’examen des obstacles en apparence insurmontables auxquels les artistes de la scène tendent aujourd’hui à se frotter, et de la créativité qu’ils sont ainsi amenés à déployer, que le second volet de notre colloque sera consacré. Nous accueillerons des communications qui analyseront notamment la manière dont le théâtre contemporain s’empare des défis suivants: l’effacement, la négation de la présence (comment joue-t-on le silence, l’immobilité, le rien?) ; l’ouverture aux « mouvements aberrants» (Deleuze, L’Image-temps ) : accélérés, ralentis, inversions, fragmentations, changements de proportions ; le dédoublement: gémellité, ubiquité, simultanéité, mise en concurrence des régimes de représentation; ou encore l’abstraction (que proposent par exemple les metteurs en scène d’ Atteintes à sa vie face à la didascalie liminaire de Martin Crimp, qui précise que la pièce a été écrite «pour une troupe d’acteurs dont la composition devrait refléter la composition du monde, au-delà du théâtre»?). Nous examinerons, voire confronterons, les solutions concrètes au moyen desquelles les artistes s’attachent à rendre théâtralement efficace ce qui résiste à la scène, et à faire de ce qu’il est «impossible de représenter» le terreau de possibilités scéniques nouvelles. Nous nous appuierons également sur les témoignages de metteurs en scène et de comédiens, auxquels nous demanderons ce qui relève pour eux de l’injouable, de la «tâche irréalisable» (Antoine Vitez), et ce qu’ils estiment pouvoir gagner, le cas échéant, à s’y mesurer. L’objectif sera double: il s’agira d’une part d’identifier les principaux problèmes de représentation qui travaillent la scène contemporaine – quels sont-ils? à quoi tiennent-ils? –, et d’autre part d’interroger les enjeux, pour les artistes comme pour les spectateurs, qui leur sont attachés. Comité scientifique : Peter Boenisch (University of Surrey), Bénédicte Boisson (Université Rennes2), Christophe Cave (Université Stendhal-Grenoble3), Joseph Danan (Université Sorbonne Nouvelle - Paris3), Marie-Christine Lesage (Université du Québec A Montréal), Ariane Martinez (Université Stendhal-Grenoble3), Gretchen Schiller (Brunel University), Julie Sermon (Université Lumière-Lyon2), Julie Valero (Université Stendhal-Grenoble3) Les propositions de contribution (500 mots environ, en français ou en anglais, accompagnés d’une brève notice biobliographique) sont à envoyer conjointement, avant le 31 mars 2013, aux adresses suivantes: severine.ruset@u-grenoble3.fr , alice.folco@u-grenoble3.fr

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